Ode à la Curiosité, une blog-série par Mathilde Morgenthaler

ÉPISODe 4/4 :

L'importance de la curiosité
 

Avez-vous déjà entendu cette célèbre phrase :
" Éduquer ce n'est pas remplir un vase, c'est allumer un feu. "
La première fois que je l’ai entendue, je me suis dis “bon sang, c’est bien vrai !”. Mais aujourd'hui, je trouve qu’il y a quelque chose qui cloche...

Dans "allumer un feu", j'entends un contexte culturel où l'information, la connaissance, la compréhension et soumise à un monopole (celui des maîtres) qui détiennent un savoir que la masse est trèèès loin d'imaginer, et qui pourrait changer leur vie. Ces maîtres interviennent comme des sauveurs auprès d'une poignée de disciples sélectionnés pour recevoir et transmettre leur héritage. Ceux-là les chérissent plus que leurs propres parents : ils leur font l'honneur suprême de leur transmettre les secrets de l'univers, de faire un pas de plus vers l'immortalité.

Genre des cro-magnons à qui on fait découvrir à quoi peut servir un téléphone. Les plus ouverts d'esprit capteront vite, d'autres auront peur, mais vous serez là pour "allumer le feu" chez tout le monde, les rassurer, leur faire comprendre que cette magie est bien réelle et qu'ils peuvent s'en servir pour accéder au rang de demi-dieu que vous êtes à leurs yeux, vous, le détenteur de cet objet magique si intriguant.

Cette idée "d'allumer un feu" chez l'enfant, c'est pour moi encore invariablement créer des bons et des mauvais élèves... car ces enfants seront faits de telle ou telle essence, qui "brûleront" plus ou moins bien à la lumière de votre sapience. Et vous, le maître, devrez vous rendre à l'évidence que si vous parvenez à allumer un feu chez tous, il y en aura toujours qui, sans que vous n'y puissiez rien, vous échapperont toujours. Certains même laisseront échapper des fumées toxiques qui vont brûleront les yeux.

Conclusion : si vous voulez être un bon allumeur de feu, choisissez vos éléments avec soin, ne prenez que les meilleurs (c'est à dire ceux qui ont les "qualités" que vous attendez d'eux), et vous ne pourrez pas rater votre effet.


André Stern a reformulé cette phrase d’une manière qui me paraît beaucoup plus juste : “l’enfant est un brasier incandescent que l'on doit (juste) s'abstenir d'éteindre…”

Je sais que je ne suis pas née avec un feu éteint. Ni moi, ni vous, ni cet enfant là, ni personne. Aucun être ou animal. Comment pourrions-nous être vivants et conscients si nous étions “éteints” ? Quand on dit de quelqu’un qu’il s’est éteint, c’est qu’il est mort, n’est-ce pas ?
Peut-être que vous connaissez quelqu’un dont la flamme n’a pas ce qui lui faut pour s’épanouir, et qu’elle vivote. Mais donnez lui ce dont elle a besoin et elle fera feu de tout bois. Le feu n’a pas besoin de vous pour l’allumer, il est déjà là. Il n’a besoin que de 3 choses pour bien brûler : du bon combustible (un environnement riche), de la chaleur (de l’amour) et de l'oxygène (du temps libre).

La meilleure et la seule façon de permettre à plus petit que soi (ou plus grand que soi, ça marche dans tous les sens) de s’enrichir de nous est de nous focaliser sur notre propre enrichissement, en les accueillant lorsqu’ils veulent nous accompagner, et en les laissant libres lorsqu’ils veulent faire leur vie.
Il faut être en connexion avec soi pour pouvoir être harmonieusement connecté avec l’autre...

Pourquoi la curiosité est-elle cruciale ?

Parce qu’elle est le seul activateur d’intelligence que nous connaissons.

Les personnes que l’on trouve particulièrement intelligentes (selon nos critères de jugement) se différencient des autres par leur curiosité plus intense. Qui vient toujours d’une impérieuse nécessité intérieure, avec laquelle ils sont dans un contact sensible. Leur curiosité se ramifie dans de plus nombreuses directions, fait plus de tentatives de connexions… Ils tentent plus. Mais sont-ils meilleurs que les autres ? Non. Certains d’entre eux sont même les pires d’un point de vue moral.
Pour que l’intelligence ne pousse pas seule au détriment de la sagesse et du cœur, offrez-lui simplement un environnement plus riche, plus chaleureux et plus oxygéné.

Après, qu’on apparaisse comme un génie ou tout son contraire, on est comme tout le monde : à la ramasse dans tout domaine où on n’est pas curieux, où l’on n’a pas envie d’aller voir. Et vue que nous vivons dans un Temps limité (même nombre d’heures dans une journée pour chacun, ça c’est ce qu’on appelle de l’équité !), personne ne peut se développer significativement dans tous les domaines (au nombre infini). Mais ce serait faisable dans une autre réalité temporelle :-)

La curiosité est très importante… Parce que sans elle, pas de bonheur ni de satisfaction en vue.

Dans mon expérience personnelle, c’est systématiquement à des moments où ma conscience était ouverte et avide de saisir l’expérience, que j’ai ressenti le plus de jouissance existentielle, de créativité, d’intelligence, de bien-être, d’accomplissement, de gratitude à vivre ma vie et à être qui je suis.

Ce désir d’embrasser la vie dans son entièreté, ou d’en saisir un détail par tous ses contours, est en corrélation directe avec notre taux de bonheur. On peut observer son activité comme on observe l’activité d’un volcan. Et grâce au perpétuel feed-back de la vie, on peut observer comment les stratégies que l’on développe pour être plus heureux fonctionnent… ou pas. Car n’est-ce pas là le but de la vie ?

Apprendre à faire de bons choix, voilà sans doute le seul et le meilleur apprentissage que l’on puisse faire dans sa vie. Apprendre à faire des choix meilleurs que les précédents, et puis d’autres encore, encore meilleurs. Chaque jour, chaque heure, chaque instant nous offre cette opportunité d’apprentissage.

A chaque moment où nous laissons quelqu’un être comme il est, faire ce il fait, nous le laissons découvrir à chaque seconde ce sur quoi il va choisir de se concentrer.
Ce genre de “choix” est déterminé en collaboration entre la partie consciente de notre psyché, et sa partie inconsciente, qui ensemble impriment l’expérience en profondeur, laquelle s’ajoute à nos expériences passées pour former un apprentissage.

Ainsi, chacun bâtit son expérience, son expertise, en connexion avec son environnement.
La curiosité est comme un oiseau. Il faut la laisser LIBRE de voler, de voyager où elle le souhaite dans l’espace sauvage. En cage, elle dépérit. Les enfants qui “rêvassent, sont dans la lune” en classe se battent instinctivement pour leur liberté psychique. Peut-être que ceux-là seront moins cassés que d’autres…
Et cet oiseau est un élément essentiel, elle est une pièce du puzzle de l’existence.

Nous arrivons au bout de cette blog-série.

Je vous propose de vous poser cette question :

De quoi suis-je curieux(se), là maintenant ?

Et pour finir, je vous offre en partage cette musique qui saura vous parler autrement que par des mots… :-)

Retrouvez ici les épisodes précédents :

1 - Le Rêve
2 - Ouvert comme un objectif

3- Comment préserver la curiosité ?